Le défi politique de l’anti racisme - Congrès PCF

Universalisme, anti-racisme, lutte des classes.

Je suis directrice de théâtre à la retraite, donc je fais partie des "couches moyennes". Je suis blanche d'apparence et en fait je suis métis par ma famille maternelle de Martinique. Je n'ai donc pas vécu le racisme "en première ligne". Et pourtant je l'ai vécu à travers l'expérience directe, en tenant la main de ma mère et de ma grand-mère dans le métro, au marché.... Je reste communiste au sens où je travaille chaque moment à la transformation sociale des rapports de domination institués par le capitalisme. Qu'est-ce que la construction du racisme? Le racisme, même s'il apparait sous la forme de réactions pulsionnelles au quotidien est d'abord un rapport systémique de domination, inséré dans le rapport de domination capitaliste. L'essor du capitalisme s'est basé sur l'accumulation primitive du capital. Or cette accumulation primitive s'est réalisée dans le colonialisme et l'esclavage. Pour les justifier, il a fallu inventer des races inférieures "autochtones" auxquelles il fallait apporter "la civilisation" et ainsi s'est constituée cette idéologie raciste. C'est au nom de cet "universalisme" occidental de la supériorité de la race blanche que le racisme s'est installé durablement comme idéologie consciente ou inconsciente. Il faut donc se demander concrètement, très concrètement au cours de l'Histoire ce que cet "universalisme" d'abord religieux (le catholicisme est prosèlyte), culturel (il fallait étouffer les modes de pensées, de vie, de culture, les identités des "autochtones") et politique (il fallait instituer le racisme en tant que tel : Code Noir, Code de l'Indigénat etc...) a produit avant de le proclamer totalement notre (à nous communistes). Certes nous revendiquons l'héritage humaniste des Lumières. Mais les communistes doivent interroger "Les Lumières" qui finalement ont trouvé leurs limites quand il s'est agi de l'égalité des femmes et l'universalité des droits de peuples, infériorisés et racisés. Il est établi que les races n'existent pas mais le racisme existe lui: même dans les couches moyennes et moyennes-supérieures. Je fais partie du Collectif Décoloniser Les Arts et nous avons compté le nombre de racisé-e-s dans les institutions publiques de la culture et de l'art: moins de 5%. Dans ces 5%, nous comptons les personnels de sécurité (les grands noirs costauds) et les personnels d'entretien... 1% à des postes de direction, de mise en scène et sur les plateaux......... Jusqu'à récemment les récits décoloniaux étaient pratiquement inexistants dans ces institutions d'état, au prétexte toujours invoqué qu'ils sont particularistes, voire communautaires, de toute façon pas universels. Alors oui le PCF doit rattraper son retard sur ces questions et approfondir la question de l'Universalisme qu'il a mis sur le piédestal de la Révolution Française qui quand même a abouti à la prise de pouvoir de la bourgeoisie et le capitalisme.... Le combat des racisé-e-s, comme celui des femmes est en première ligne dans le combat de libération dont le PCF s'est tenu écarté longtemps au nom de la priorité de la lutte des classes et de l'universalisme. La lutte des classe, c'est concret. L'Univesalisme, c'est une abstraction, élaborée historiquement que le PCF doit interroger au regard du concret de l'Histoire, de ses contradictions premières et secondaires. Entendre la parole des récisé-e-s est d'une urgence absolue pour mener à bien une convergence des luttes anti-capitalistes et nous n'attendrons pas le grand soir de la révolution prolétarienne, car le racisme est une idéologie imprégnée, persistante, vicieuse qui fait dire à certains communistes qu'ils vont apprendre comment ils doivent lutter, dans le cadre de la lutte des classes....le fraternalisme ( comme autre forme du paternalisme) dénoncé par Césaire. "L'HEURE DE NOUS-MÊMES A SONNÉ" dit Césaire. (Relire sa lettre à Maurice Thorez) D'autant que la bataille fait rage et que certains d'entre nous tombent dans le panneau des extrémistes de la laïcité qui font de ce combat un combat communautariste.... Beaucoup encore à dire..... Leïla Cukierman